Proposez une utilisation spécifique de la couleur dans votre production plastique, bi ou tridimensionnelle, changeant ou perturbant les repères visuels et spatiaux du spectateur.
#couleur #espace #perception #dispositif
Questions
Dans quelle mesure une production artistique peut-elle interagir avec son espace de monstration ?
Dans quelle limite la couleur peut-elle se libérer de ses fonctions localisantes et dénotatives et acquérir davantage d’autonomie n’ayant plus fonction de particulariser ou de remplir une aire ou un plan ? (à propos du terme Color Field painting, Clement GREENBERG, 1962)
En quoi la couleur peut-elle impliquer le spectateur dans une expérience sensible ? En quoi la couleur questionne-t-elle la perception de l’espace ? Dans quelle limite la couleur peut-elle modifier la perception spatiale de son environnement ?
[Matériaux de la couleur et couleur comme matériau de l’œuvre : rapports à la perception, à l’espace]
Objectifs pédagogiques
Les objectifs de la séquence sont d’amener les élèves à :
- comprendre que la couleur peut suggérer autre chose que ce qu’elle est et se libérer du référent réel
- découvrir que la couleur peut influer sur la réception d’un environnement par le spectateur et par conséquent imposer une nouvelle perception de l’espace.
Art de la couleur
Johannes ITTEN, professeur au Bauhaus définit 7 effets de contrastes différents (Art de la couleur, 1961) :
- Le contraste de la couleur en soi : Il a lieu lorsque les couleurs pures sont utilisées dans une composition de couleurs. Le blanc et le noir peuvent intensifier l’effet vivace.
- Le contraste clair-obscur : Il s’applique à l’utilisation des différentes couleurs claires et valeurs de tons. Toutes les couleurs peuvent être éclaircies par le blanc et obscurcies par le noir. Pour commencer, il faut fabriquer des échelles de tons, pour chaque couleur qui correspond à l’échelle clair-obscur.
- Le contraste chaud-froid : On obtient le plus grand effet avec les couleurs rouge-orangé et vert-bleu. Toutes les autres couleurs apparaissent froides ou chaudes selon qu’elles sont en contraste avec des tons chauds ou froids.
- Le contraste des complémentaires : Dans son cercle chromatique, les couleurs complémentaires s’opposent. Lorsqu’on mélange des couleurs complémentaires, il en résulte un noir-gris neutre. Les couleurs complémentaires, placées les unes à côté des autres, parviennent à leur plus grande luminosité et, mélangées, se détruisent pour donner un noir-gris.
- Le contraste simultané : Son effet repose sur la loi des complémentaires, selon laquelle chaque couleur pure attire physiologiquement la couleur opposée. Si cette couleur n’existe pas, l’œil crée simultanément la couleur complémentaire. Un vert intense transformera un gris neutre situé à côté de lui en un gris rougeâtre, le même gris neutre situé à côté d’un rouge intense apparaîtra gris verdâtre.
- Le contraste de qualité : Il consiste en une opposition de couleurs brillantes et mates. On les rend opaques avec du noir, du blanc, du gris ou des couleurs complémentaires.
- Le contraste de quantité : Il repose sur l’opposition de différentes grandes surfaces de couleur.
Razzle Dazzle
Camouflage disruptif, aussi connu sous le nom de Razzle Dazzle aux États-Unis (dazzle signifiant « embrouiller » en anglais), était une technique de camouflage destinée à protéger un navire des tirs d’artillerie et de torpilles, en empêchant l’adversaire d’estimer avec précision sa position et son cap. Attribué à l’artiste Norman Wilkinson, ce camouflage repose sur un motif complexe formé d’un enchevêtrement de lignes irrégulières et de couleurs très contrastées, afin de briser la silhouette du navire.

4 références possibles en rapport avec le camouflage disruptif :
- Alain JACQUET, Camouflage Henri Matisse Luxe, Calme et Volupté, 1963, acrylique sur toile, 203×144 cm, Centre Pompidou, Paris
- Andy WARHOL, Self-portrait Camouflage, 1986, acrylique et sérigraphie sur toile, 208×208 cm, The MET, NY
- Liu BOLIN, Hiding in the City, photographies, 2005
- Shigeki MATSUYAMA, Dazzle Room, 2016 – https://vimeo.com/183382345
Références artistiques possibles
- Caspar David FRIEDRICH (1774-1840), La Mer de glace ou le Naufrage (Das Eismeer), 1823-1824, huile sur toile, 96,7×126,9 cm, Kunsthalle, Hambourg
- Claude MONET (1840-1926), Impression, soleil levant, 1872, huile sur toile, 48×63 cm, Musée Marmottan Monet, Paris
- André DERAIN (1880-1954), La Route en lacets près de L’Estaque, été 1906, huile sur toile, 129×195 cm, Museum of Arts, Houston.
- Henri MATISSE (1869-1954), L’Atelier rouge, Issy-les-Moulineaux, 1911, huile sur toile, 181×219,1 cm, MoMA, NY

Le Fauvisme (ou les fauves) est un mouvement pictural né en France au début du 20e siècle. Les artistes de ce mouvement prônent l’utilisation de la couleur, et non du dessin comme il est d’usage dans l’art officiel. Le mouvement est caractérisé par la systématisation de formes simplifiées, cloisonnées par des contours marqués, et l’audace dans les recherches chromatiques. Les peintres ont recours à de larges aplats de couleurs pures et vives. La couleur n’a pas pour ambition d’imiter la nature : la couleur devient un moyen pour l’artiste d’interpréter son sujet (en revendiquant une approche émotionnelle), au détriment du mimétisme habituellement recherché dans l’art académique. https://fr.wikipedia.org/wiki/Fauvisme
- Robert DELAUNAY (1885-1941), La Fenêtre, 1912, huile sur toile, 45,8 x 37,5 cm, Musée de Grenoble
- Mark ROTHKO (1903-1970), Red, Black, White on Yellow, 1955, huile sur toile, 266×236 cm

- Morris LOUIS (1912-1962), Dalet Kaf, 1959, acrylique sur toile, 255,59×363,22 cm, Modern Art Museum of Fort Worth, Dallas
- Yves KLEIN (1928-1962), IKB3, Monochrome bleu, 1960, pigment pur et résine synthétique sur toile marouflée sur bois, 199×153 cm, Centre Pompidou, Paris. Depuis les premiers tableaux monochromes d’un bleu outremer breveté IKB (International Klein Blue), datant de la seconde moitié des années 1950, l’œuvre d’Yves Klein obéit à une même conception. Pour lui, le rôle de l’artiste est de saisir la beauté partout où elle se loge, pour la révéler aux autres hommes. Comme ici avec ce tableau de grand format IKB 3, le bleu est pour l’artiste chargé de sensibilité et propice au passage du matériel à l’immatériel : « Toutes les couleurs amènent des associations d’idées concrètes, matérielles et tangibles, tandis que le bleu rappelle tout au plus la mer et le ciel, ce qu’il y a de plus abstrait dans la nature tangible et visible. »
- Lucio FONTANA (1899-1968), Concetto spaziale, Attese, 1967, émulsion sur toile lacérée, 80x 65 cm, Collection particulière

- Victor VASARELY (1906-1997), Alom (Rêve), 1966, collage sur contreplaqué, 252×252 cm, Centre Pompidou, Paris
Op art est une expression utilisée pour décrire certaines pratiques et recherches artistiques faites à partir des années 1960 et qui exploitent la faillibilité de l’œil à travers des jeux d’optique. Les œuvres de l’art optique sont essentiellement abstraites. Les pièces donnent l’impression de mouvement, d’éclat de lumière et de vibration ou de mouvements alternés. Ces sollicitations visuelles placent le spectateur en situation instable, plongé dans une sensation de vertige. https://fr.wikipedia.org/wiki/Op_art
- Ellsworth KELLY (1923-2015), Two Panels: Blue-Yellow, 1970, acrylique sur toile, 79×427,2 cm, chaque panneau : 79,4×213,8×4,6 cm

- Josef ALBERS (1888-1976), Homage to the Square (Hommage au carré), série d’œuvres réalisées à partir de 1949 jusqu’en 1976. Quel que soit le support, chaque œuvre obéit à une formule invariable : un format carré (de 40,6 cm à 122 cm de côté) comportant trois ou quatre carrés imbriqués, de couleur unie. Le plus grand carré occupe toute la surface ; les carrés suivants (s’ils sont présents) n’en recouvrent que 80%, 60% et 40%. Ils sont centrés horizontalement, mais décalés verticalement vers le bas de l’œuvre. Leur disposition est reprise à l’identique pour toute la série.
- Ólafur ELÍASSON (1967-), The Weather Project, nov. 2003, installation dans le hall de la Tate Modern, Londres

- Jesús Rafael SOTO (1923-2005), s/t (Pénétrable de Houston), 2004, pénétrable, 20x12x8,50 m, Houson Museum of Fine Arts, Houston
- Ann Veronica JANSSENS (1956-), Rose, 2007, installation, 7 projecteurs, machine à brouillard, Centre Pompidou, Paris. L’œuvre d’Ann Veronica Janssens engage plusieurs médiums, dont la sculpture et les environnements immersifs. Ses matériaux de prédilection sont la lumière et les brouillards artificiels. Ses recherches se fondent sur l’expérience sensorielle et questionnent la relation du corps à l’espace. Dans son œuvre, la lumière n’est plus un instrument ou une condition, mais une matière diffuse qu’elle travaille en tant que sujet, soulignant son caractère éphémère.
- Georges ROUSSE (1947-), Arles 2006, photographies – https://www.georgesrousse.com/selections/archive/2006/
- Gerhard RICHTER (1932-), Vitrail de la cathédrale de Cologne, 2007, vitrail composé de 11 263 carreaux de verre de 72 couleurs, placés au hasard, mesurant chacun 9,6 cm de côté
- Ólafur ELÍASSON (1967-), Din blinde passager, 2010, installation d’un tunnel de 45 m de long rempli de brouillard artificiel, Museum of Modern Art, Copenhague


- Anish KAPOOR (1954-), Leviathan, 2011, sculpture monumentale/ installation, 35 m de haut, 100 m de long, 72000 m3, environ 12 tonnes, Grand Palais, Monumenta 2011, Paris
- James TURELL, Aten Reign, 2013, installation au Musée Guggenheim de New York. L’œuvre est construite à partir de cinq cônes distincts, similaires à des abat-jours, en aluminium et PVC, empilés les uns sur les autres et suspendus à la rotonde. Chaque cône a deux couches de tissu, un blanc à l’intérieur et un noir à l’extérieur, qui permettent à chaque section d’atteindre une pleine saturation de couleur et empêchent les fuites de lumière. Au sommet de l’installation, un diffuseur translucide laisse entrer la lumière du jour, et une couche de gaze fine entre chaque cône capte juste assez de lumière pour donner l’impression que c’est la matière qui emplit un espace aux dimensions incertaines. La lumière est produite par deux anneaux de luminaires LED à changement de couleur, montés et dissimulés à la base de chaque cône. L’ensemble lumineux est piloté par DMX et relié par câble à un mélangeur de couleurs contrôlé par un programme développé par le studio de James Turrell.


- Anish KAPOOR (1954-), Void Pavilion V, 2018, bois (vantablack), ciment, pigment, 6x6x12 m

Vocabulaire
- La perspective atmosphérique est une technique principalement picturale qui consiste à marquer la profondeur de plans successifs en leur donnant progressivement (du proche au lointain) la couleur de l’atmosphère, du ciel. Elle est différente du sfumato qui adoucit les contours des lointains (ou même des corps des personnages des premiers plans).
- Abstraction géométrique : tendance de l’art abstrait qui expérimente la force de la ligne, des figures géométriques et de la couleur. Le concept d’art abstrait commença à être théorisé par ses pionniers au début du 20e siècle : František KUPKA (1871-1957), Vassily KANDINSKY (1866-1944), Kasimir MALEVITCH (1879-1935) et Piet MONDRIAN (1872-1944).
- Abstraction lyrique : la liberté plastique de l’expression gestuelle et émotionnelle se manifeste par des procédés alliant projection linéaire, taches ou brossages plus ou moins amples de la couleur sur la toile.
- Aplat : surface ou plage dont l’unique teinte est appliquée de façon uniforme, surface unie, dépourvue de trame ou de trait.
- Color Field painting movement : Le style (1950-1975) se distingue essentiellement par de grandes étendues de couleur brutes et unies qui créent des plans ininterrompus. « La couleur est libérée du contexte objectif et devient le sujet lui-même. »_ Themes in American Art: Abstraction. National Gallery of Art. La liste suivante indique les peintres, artistes et influences majeures liés au mouvement : Josef ALBERS (1888–1976), Sam FRANCIS (1923-1994), Ellsworth KELLY (1923-2015), Morris LOUIS (1912-1962), Ad REINHARDT (1913-1967), Mark ROTHKO (1903-1970), Frank STELLA (1936-).
- Hard Edge painting désigne un mouvement artistique caractérisé par des œuvres peintes dans lesquelles les transitions sont brusques entre les zones de couleur. Le style de peinture Hard Edge est lié à l’abstraction géométrique, à l’Op Art, à l’Abstraction post-picturale et à la Color Field painting.
- Monochrome : qui est d’une seule couleur.
- Nuance : la nuance d’une couleur résulte du mélange de cette couleur avec une faible quantité de ses voisines du cercle chromatique.
- Teinte : synonyme de couleur, la teinte est la qualité qui distingue une couleur d’une autre. C’est ce qui permet de différencier le bleu du jaune, par exemple.
- Valeur : degré de clair ou d’obscur, de lumière ou d’ombre (variant entre le blanc et le noir), abstraction faite des couleurs.
Domaines de l’investigation et de la mise en œuvre des langages et des pratiques plastiques : outils, moyens, techniques, médiums, matériaux, notions au service d’une création à visée artistique
La figuration et l’image ; la non-figuration
– Systèmes plastiques non figuratifs : couleur, outil, trace, rythme, signe
La matière, les matériaux et la matérialité de l’œuvre
– Matériaux de la couleur et couleur comme matériau de l’œuvre : exploitation de la matière colorée, aspects sensoriels, rapports à la perception, à l’espace
*Photographie mise en avant : Din blinde passager (2010), installation de Ólafur ELÍASSON