« Oppressant, menaçant, sombre, inquiétant, écrasant, déstabilisant, labyrinthique, angoissant… »
Réalisez un diorama* (ou un dispositif proche) inspiré par un extrait du film expressionniste de Robert WIENE Le Cabinet du docteur Caligari (1920) et la liste de mots ci-dessus.
*Le diorama est un dispositif de présentation par mise en situation ou mise en scène d’un modèle d’exposition, le faisant apparaître dans son environnement habituel. C’est un mode de reconstitution d’une scène en volume.
Objectifs
La séquence a pour objectifs d’amener les élèves à :
- comprendre les enjeux de l’expressionnisme
- saisir qu’un lieu peut agir en résonance avec l‘artiste, l’œuvre, sa démarche, le spectateur et être source de création
- réaliser que la matérialité d’une œuvre influe sur sa réception par le spectateur
- penser l’espace de présentation et l’espace réel comme une partie de l’œuvre.
Questions
En quoi la matérialité physique de l’œuvre se donne-t-elle à voir comme un dispositif de représentation ? Quelles peuvent être les incidences des matériaux utilisés ?
En quoi l’espace de présentation peut-il devenir une partie de la production artistique ? Dans quelle mesure l’espace de présentation peut-il interagir avec l’œuvre ? En quoi la modification d’échelle change-t-elle le sens de la production plastique ?
Le Cabinet du docteur Caligari
Film muet, noir et blanc, allemand de 71 minutes réalisé par Robert WIENE sorti en salles en 1920.
Généralement considéré comme la quintessence du cinéma expressionniste allemand, il met en scène l’histoire de Francis et d’un homme mystérieux, le docteur Caligari qui utilise un somnambule, Cesare, pour commettre des meurtres.
Dans ce qui semble être un parc, Francis est assis sur un banc avec un homme plus âgé et se plaint que les esprits l’ont éloigné de sa famille et de sa maison. Lorsqu’une femme hébétée passe devant eux, Francis explique qu’elle est sa fiancée, Jane, et qu’ils ont subi une grande épreuve. La majeure partie du reste du film est un flashback de l’histoire de Francis…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Cabinet_du_docteur_Caligari

À propos des décors
À Berlin naît en 1910 la revue Der Sturm qui compte parmi ses membres les trois peintres Herman Warm, Walter Röhrig et Walter Reinmann qui seront responsables de la création des décors du Cabinet du Dr Caligari. Le décor du film apparaît comme principal support de la narration. L’ambiance onirique et torturée véhiculée par ces décors traduit visuellement les différents sentiments du narrateur. Décors en trompe-l’œil, perspectives faussées ou déformées, lignes brisées, courbes amplifiées, contrastes exacerbés, toutes ces techniques concourent à dessiner un univers agressif et perturbateur. Le décor prend véritablement vie. De même que Cesare le somnambule vit sous l’emprise du Dr Caligari, les personnages sont dominés par un environnement oppressant et terrifiant où la lumière participe à renforcer cette atmosphère troublante et inquiétante.
Expressionnisme
Mouvement artistique apparu au début du 20e siècle en Europe du Nord, particulièrement en Allemagne. Plutôt que d’un style unique et pictural – défini par un chromatisme intense, une touche marquée et un espace désarticulé, il s’agit d’un climat qui ne touche pas seulement les Beaux-Arts, mais aussi la danse, le cinéma, la littérature et le théâtre. Pour la génération d’avant-guerre, l’œuvre d’art devient un support sur lequel l’artiste extériorise son inquiétude intérieure face aux tensions morales et politiques engendrées par une société où il se sent déraciné.
Le 7 juin 1905, à Dresde, quatre étudiants en architecture, Ernst Ludwig KIRCHNER (1880-1938), Erich HECKEL (1883-1970), Fritz BLEYL (1880-1966) et Karl SCHMIDT-ROTTLUFF (1884-1976), fondent officiellement le groupe Die BRÜCKE, affirmant leur volonté de jeter un pont vers une forme d’art nouvelle. Leur peinture se distingue par une déformation marquée de la réalité et l’utilisation de couleurs criardes, en réaction à l’autoritarisme artistique de l’empereur Guillaume II, qui prônait un art académique.
Die Brücke fut l’un des deux groupes fondamentaux de peintres expressionnistes allemands, l’autre étant Der Blaue Reiter (Le Cavalier bleu) formé à Munich en 1911 par des artistes tels que Vassily KANDINSKY (1866-1944), Franz MARC (1880-1916) et August MACKE (1887-1914).
La démarche artistique du groupe Der Blaue Reiter a joué un rôle majeur dans le développement de l’art abstrait au cours du 20e siècle, du fait, que son aspiration se fonde sur la notion d’intériorité, concept fondamental pour comprendre l’idéologie artistique défendue par Kandinsky et Marc.








Références artistiques possibles
- Samuel VAN HOOGSTRATEN (1627-1678), 1655-1660, A Peepshow with Views of the Interior of a Dutch House (Boîte optique avec perspectives de l’intérieur d’une maison hollandaise), bois, peinture à l’huile et à l’œuf, 88 × 60,5 x 58 cm, The National Gallery, Londres, Royaume-Uni
- Friedrich Wilhelm MURNAU 1888-1932), Nosferatu, eine Symphonie des Grauens (Nosferatu le vampire), 1922, film fantastique, muet en noir et blanc, 94 min


- Fritz LANG 1890-1976), Metropolis, 1927, film de science fiction en noir et blanc, 153 min
- Joseph CORNELL (1903-1972), Object (Abeilles), 1940, boîte, assemblage, 23,18 × 35,88 × 8,73 cm, National Gallery of Art, Washington, États-Unis
- Marcel DUCHAMP (1887-1968), Étant donnés : 1° la chute d’eau / 2° le gaz d’éclairage, 1946 / 1966, installation, assemblage de techniques mixtes, 153 × 111 × 300 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, États-Unis
- Joseph CORNELL (1903-1972), Soap Bubble Set, 1949, verres, pipes, papier imprimé et autres supports dans une boîte en bois vitrée, 37,5 × 47,6 × 10,7 cm, Smithsonian American Art Museum, Washington, États-Unis – https://americanart.si.edu/artwork/soap-bubble-set-41412
- Ilya Iosifovich KABAKOV (1933-2023), The Man Who Flew into Space from His Apartment, 1981-1988, installation, bois, caoutchouc, cordes, papiers, lampe électrique, vaisselle, maquette, gravats et poussière de plâtre, dimensions : 280 x 242 x 613 cm. L’installation comprend un vestibule et une pièce. Dans le vestibule, recouvert de papier peint, un panneau et des dépliants explicatifs, un manteau suspendu. L’accès à la pièce est fermé par des planches espacées qui permettent de voir ce qui se passe à l’intérieur : suspendu au plafond troué un siège de catapulte, au sol des gravats. La pièce est meublée pauvrement d’un lit pliant, de chaises, d’un peu de vaisselle, de planches, d’une lampe, d’une maquette de la ville. Les murs sont tapissés d’affiches et de dessins. Centre Pompidou, Paris
- Charles MATTON (1931-2008), Reconstitution de lieux : atelier de Giacometti, 1987, construction composée de bois, résine, papier, plâtre, verre, œuvre présentée sur un socle en métal : 48,5 × 33,5 × 36,5 cm (hors socle), Collection particulière, Paris


- Richard BAQUIÉ (1952-1996), Sans titre. Étant donnés, 1991, réplique réalisée en suivant simplement les notes de Marcel Duchamp publiées par le Musée de Philadelphie à l’échelle 1/1 intitulée « Sans Titre. Etant donnés : 1°La chute d’eau 2°Le gaz d’éclairage », 1946-66 par Richard Baquié à la différence qu’elle est visible sous tous les angles exposant ainsi sa machinerie, bois, métal, velours, linoleum, briques, bec Auer, résine plâtre, cuir, fagots, verre, photographie, peinture acrylique, ampoules électriques et tubes néon, 259 x 204 x 408 cm, installation exposée lors de la 1re Biennale d’art contemporain de Lyon « L’amour de l’art : une exposition de l’art contemporain en France »
- Louise BOURGEOIS (1911-2010), Chambre rouge (Parents) [Red Room (Parents)], 1994, bois, métal, caoutchouc, tissu, marbre, verre et miroir,
247 × 426 x 424 cm, Musée Guggenheim, Bilbao - Hiroshi SUGIMOTO (1948), Gorilla, 1994, prise de vue réalisée dans l’African Hall du Muséum d’Histoire Naturelle de New York en 1974, épreuve argentique, 38,7 x 58 cm, Sonnabend Gallery, New York, États-Unis
- Franz ACKERMANN (1963), Songline, 1998, installation qui comporte des peintures, des collages de cartes postales, du son, des miroirs configurés en labyrinthe remplissant ainsi un espace pictural sans repère, DVD, peinture sur bois, photographie, présentoirs de et avec cartes postales, miroir synthétique, écran de projection, vidéo de 4’38 », dimensions variables, Neuer Aachener Kunstverein, Aix-la-Chapelle, Allemagne, Coll. Templon-Franz Ackermann, Paris
- Yayoi KUSAMA (1929), Infinity mirror rooms – Fireflies on the Water, 2002, installation, miroirs, plexiglas, lumières et eau, 281,9 × 367 × 367 cm, Whitney Museum of American Art, New York, États-Unis
- Wendy RED STAR (1981), Indian Summer (from the series Four Seasons), 2006, photographie, 58,4 × 66 cm, Coll. de l’artiste
- Richard BARNES (1953), Man with buffalo (Animal Logic), 2007, C-Print, 101,6 × 127 cm, Coll. Richard Barnes

- Pierrick SORIN (1960), I Would Like to Live in a Doll House, 2011, hologramme, théâtre optique, 200 x 120 x 130 cm, MNAM, Paris
- Dulce PINZÓN (1974), Nostalgia, Historias del Paraíso series, 2011, C-Print, 76,2 × 101,6 cm, Coll. particulière
- Mathieu MERCIER (1970), Sans titre (Couple d’axolotls), 2012, diorama, vitrine, éclairage, néon, terre, aquarium, eau, couple d’axolotls, 219,5 x 180 x 330 cm, Centre d’art contemporain, Ivry-le-Crédac
- Anselm KIEFER (1945), Family Pictures, 2013-2017, métal, verre, plomb, bois, acrylique, photographie, aquarelle sur papier, matériaux divers, ensemble de 16 boîtes, ensemble 3,51 x 14 x 1 m, Coll. de l’artiste


- Kent MONKMAN (1965), Bête noire, 2014, installation, acrylique sur toile, matériaux divers, 488 x 488 x 305 cm, Palais de Tokyo, Paris
- Abelardo MORELL (1948), Camera Obscura: View of Philadelphia From Loews Hotel Room 3013 with Upside Down Bed, 2014, photographie, C-Print, 50,8 x 59,05 cm, Coll. de l’artiste
- Tatiana TROUVÉ (1968), Notes on Sculpture, April 27th, “Maresa”, 2022-2025, Collection of the artist and Y.Z. Kami. Vue de l’installation “Tatiana Trouvé. The strange Life of Things”, 2025, Palazzo Grassi, Venise, Italie, Pinault Collection
Références aux programmes
Domaines de l’investigation et de la mise en œuvre des langages et des pratiques plastiques : outils, moyens, techniques, médiums, matériaux, notions au service d’une création à visée artistique
La représentation, ses langages, moyens plastiques et enjeux artistiques
– Rapport au réel : mimesis, ressemblance, vraisemblance et valeur expressive de l’écart
Domaines de la présentation des pratiques, des productions plastiques et de la réception du fait artistique : les relations entre l’œuvre, l’espace, l’auteur et le spectateur
La présentation et la réception de l’œuvre
– La présence matérielle de l’œuvre dans l’espace de présentation : dispositifs, disposition, échelle, intégration, in situ
– Conditions et modalités de la présentation du travail artistique : éléments constitutifs, facteurs ou apports externes (cadre, socle, cimaise… et dispositifs contemporains)
La matière, les matériaux et la matérialité de l’œuvre
– Élargissement des données matérielles de l’œuvre : intégration ou détournement du réel, matériaux artistiques et a priori non-artistiques, lumière naturelle ou artificielle
Domaines de la formalisation des processus et des démarches de création : penser l’œuvre, faire œuvre
L’idée, la réalisation et le travail de l’œuvre
– Projet de l’œuvre : de l’idée au projet et à la réalisation de la production artistique, diversité des approches et des moyens sollicités
*Photographie mise en avant : photogramme du Cabinet du docteur Caligari (1920) de Robert WIENE